Le Tangue en a lu, des communiqués à la bêtise confondante. Celui de Gaelle Lebon, à propos de la statue de Mahé de Labourdonnais, surpasse tous les autres par son argumentaire colonialiste d’une violence inouïe, qui rencontre un silence de mort.
Plus de deux pages. Deux pages de “diarrhée“, comme Gaelle Lebon le dit, pour dire tout le mal qu’elle pense du projet de déplacement de la statue de Mahé de Labourdonnais à Saint-Denis (nous ne donnerons aucun lien pour lire ça). Deux pages vomies par la leadeure du nouveau-né Rassemblement Réunion, sorte de rejeton du RN, mais pas vraiment RN, enfin beaucoup quand même.
Gaëlle Lebon : “J’suis très tolérante, j’ai des copains néonazis”
Son problème, apparemment : le “wokisme“, sans qu’elle ne daigne jamais expliquer ce que c’est. Un terme – et ses dérivés – utilisé huit fois dans son communiqué, surtout pour désigner Ericka Bareigts, la maire de Saint-Denis.
Pour appuyer son argumentaire ? Une violence que Le Tangue a rarement lue dans une prise de parole publique d’un politique. Avec cette référence à la vie privée de la maire, par exemple, dont les ascendances seraient “Malgaches et Européens“, et qui aurait “épousé un “zoreil”“. Violence envers les élus et souci des origines ethniques des gens, ça, l’extrême-droite en connait un rayon, ça fait même démissionner les maires.
“Place du Maréchal Pétain”
Mais surtout, à vouloir vomir sa bile à grands jets, Gaelle Lebon finit par raconter n’importe quoi. Elle dit que Ericka Bareigts se “présente en grande militante de l’esclavagisme“. Euh… C’est l’inverse, non ?
Puis, elle dit : “Lorsque les wokistes ont voulu en Métropole, envoyer aux “oubliettes” de l’histoire les statuts (sic) d’illustres personnages comme Colbert, Napoléon et même le Général De Gaulle… la presse ainsi que le public en général ont parlé de “déboulonnage”…” En voulant affirmer que la statue de Labourdonnais va être “déboulonnée“, et pas “déplacée” (ce qui est pourtant le cas), Gaelle Lebon nous sort donc des exemples. Soit : vérifions. Nous n’avons trouvé qu’une seule statue de ces gens-là “déboulonnée” : celle de Napoléon, à Rouen… pour être restaurée, et qui a été replacée depuis. Colbert et Charles De Gaulle ont vu leurs mises à l’honneur dans l’espace public vandalisées. Pour le grand Charles, de la peinture ou, à Evreux, une mise au sol… le soir d’un match de la CAN en 2019, des faits pour lesquels les auteurs ont été condamnés. Même traitement pour Colbert, dont la statue a reçu de la peinture en 2020.
Evidemment, Gaelle Lebon a bien tenu à rappeler les fondamentaux de son parti. Un peu de whataboutisme ? Ben oui, les Gaulois ont été “esclaves des Romains“, les “peuples du bassin méditerranéen” “esclaves des Perses“… Ouais. Mais on n’a pas de statue de Jules César ou de Xerxès à virer, à La Réunion, on ne voit donc pas vraiment le rapport.
Puis, nouvel argument, incroyable, celui-ci : les bienfaits de la colonisation. On n’en revient toujours pas : “Nous sommes issus de cette histoire grâce à la magie intégrationniste/assimilationniste de la grande histoire de la colonisation “Gallo-romano-gréco-judéo-chrétienne” dont nous sommes tous les héritiers.” Oui, vous avez bien lu : la colonisation, puis toutes les horreurs qu’elle a apportées – et auxquelles Mahe de Labourdonnais a participé – est donc “magique“, une “grande histoire“. Génial, ces esclavagistes qui déportaient par milliers des esclaves arrachés à leurs familles pour en faire de la main d’oeuvre gratuite et facile à torturer ! Merci qui ? Merci les “Gallo-romano-gréco-judéo-chrétiens” ! Et un point négationnisme (de crime conte l’humanité, c’est pas rien), un ! Et un point “Sarkozy”, au passage, avec la référence toujours de bon goût du “Kärcher“, pour désigner l’action de la maire…
Le reste, ce sont les classiques remugles de la droite et l’extrême-droite, que Gaelle Lebon rabâche. Un pseudo-effacement de l’histoire (non), la charge sur “les premiers esclavagistes chefs de tribus qui vendaient leurs semblables” (c’est évidemment plus compliqué)…
Enfin, c’est croustillant, Gaelle Lebon affirme qu’il ne faudrait pas “juger le passé avec les yeux du présent“, et donc refuser les “changements de noms de nos quartiers“, ce qui “gommerait” notre passé.
Avec les mêmes arguments, Gaelle Lebon se serait donc opposée à la majorité municipale de Raymond Vergès, en 1946 : ces salauds de wokistes avaient décidé d’appeler “Place du Barachois” une place jusque là nommée… “Place du Maréchal Pétain“. Faut pas renommer, c’est pas bien, c’est wokiste.
La rédaction du Tangue
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