Les discours des autorités ces derniers jours culpabilisent les Réunionnais qui ne feraient pas assez attention en pleine flambée de l’épidémie de Sars cov-2. Les politiques et les acteurs économiques, eux, sont bien épargnés. Pas par Le Tangue.
Ça va chier ! C’est Ericka Bareigts qui l’a dit, la semaine dernière, alors que le nombre de cas positifs au Sars cov-2 explosait à Saint-Denis : “J’ai décidé de faire de la pédagogie avec plus de proximité, mais en même temps, on va passer à l’étape sanction. Nous allons serrer les choses. Certains n’ayant pas la conscience de l’autre, ils peuvent les mettre en danger. Je ne les laisserai pas mettre La Réunion en danger.” Venant de celle qui n’a cessé de se promener et de courir les plateaux télé pendant le confinement, il fallait oser. Mais vous comprenez, ce sont les Réunionnais, les méchants, qui ne respectent pas la distanciation ni le port du masques ! Les salauds !
Même rengaine avec Sébastien Lecornu, qui tapait aussi du poing sur la table en début de semaine : “Malheureusement on constate qu’un certain nombre de nos concitoyens sont dans une forme de relâchement sur le port du masque, sur les gestes-barrière“, disait-il, alors que de nombreuses photos le montraient sans masque. Mais là, encore, hein, c’est les Réunionnais les vilains.
Cette culpabilisation des Réunionnais, qui s’accentue depuis que le nombre de cas de personnes positives augmente, a quelque chose de franchement gênant dans la mesure où on n’est pas les seuls à faire les cons. Et les autres fautifs, eux, on ne leur dit rien. Par exemple, qui s’est insurgé de l’interview du boss du Grand Raid, Robert Chicaud, dans laquelle il explique ne pas avoir à demander à ses coureurs métros de se soumettre au deuxième test après sept jours ? Personne, à part nous.
Qui a dénoncé les comportements irresponsables des politiques avant, pendant, et après le confinement, faisant campagne au mépris des recommandations sanitaires ? Nous, encore.
Qui va rappeler que si La Réunion était passée à côté de l’épidémie, c’est parce que l’aéroport avait été bouclé assez tôt après le rapatriement des réunionnais, que la quarantaine obligatoire nous avait sauvés, et que si les portes ont été ouvertes de nouveau, c’est à cause de la pression des acteurs du tourisme ? Nous. C’est marrant : ce qui se passe aujourd’hui, on l’avait annoncé le 15 mai. On voit le résultat : les pros du tourisme ont tout fait pour faire revenir les voyageurs, on en est là, cinquante nouveaux cas hier. Mais eux, personne ne leur souffle dans les bronches. Ben oui, on va pas s’engueuler avec ces gens-là ! L’emploi, l’économie, tout ça, tout ça, vous comprenez…
Non : c’est tellement plus facile de dire aux Réunionnais qu’ils sont méchants – une habitude – parce qu’ils portent mal leurs masques et qu’ils font des pique-niques. Pas sûr que ce soit vraiment à nous de ne pas avoir la conscience tranquille.
La rédaction du Tangue