Tapis rouge, pour Séba !

 

Au Tangue, on hallucine un peu, depuis quelques jours. Après l’édito de Free Dom qui a fait une jolie promotion à sa venue, les papiers de Réunion 1ère ou de Zinfos qui le présentent comme un “militant”, il nous a paru important de rappeler qui est Kémi Séba, dont nos confrères rendent compte de la venue à La Réunion en ce moment. Et notamment du passé de celui qui s’est défini aujourd’hui comme un “activiste politique, essayiste, chroniqueur géopolitique et surtout président de l’ONG Urgences panafricanistes.” 

On peut commencer par lire ce portrait du Monde, daté de 2008. Deux ans après que son collectif “Tribu Ka”, ait été dissout pour “incitation à la haine raciale” et “antisémitisme”. Fut un temps, aussi, où il appelait les Blancs les “leucodermes“. Sympa.

À l’époque, Séba tentait un rapprochement avec les suprémacistes blancs, puisque leurs idées se rejoignaient ; pour Séba, comme pour Ayoub et toute la fine équipe aux cheveux rasés courts, il fallait les Blancs d’un côté, les Noirs de l’autre : “Le nationalisme n’est pas mon ennemi (…). Tous les mouvements nationalistes noirs se sont alliés à des gens qui voulaient vivre et protéger leur peuple” disait-il alors au Monde. En 2014, il parlait ainsi de Jean-Marie Le Pen : “Le patriote blanc qui se bat pour les siens est mon frère. On n’a pas à se fondre chez les autres.” En 2016, il sortait un roman, “inspiré de faits réels” selon lui, dans lequel il expliquait que le terrorisme islamique était en fait issu d’une conspiration entre Israel, les Américains et les Saoudiens. D’ailleurs, Séba a, par le passé, souvent été accusé d’antisémitisme, voire condamné pour cela.

Le plus étonnant est sans doute que sa venue, à La Réunion, n’ait provoqué absolument aucun remous. Car pour nombre de militants anticolonialistes, dont se réclame Kémi Séba, il n’y a rien à discuter avec lui : dans une tribune du Monde en 2017, le journaliste, blogueur et militant anticolonialiste sénégalais Racine Assane Demba accusait le polémiste de racisme et de “suprémacisme noir” : “Kémi Séba est un suprémaciste. Dans ses publications, il défend des thèses affirmant la supériorité de la race noire sur les autres et particulièrement la blanche. Il ne dit pas que “les Noirs ne sont inférieurs à personne”. Il dit que “les Noirs sont supérieurs aux autres” et doivent se préparer à une confrontation pour affirmer cette suprématie. Avec lui, le racisme devient une banalité. […]”

Et puisque Kémi Séba est aujourd’hui présenté comme le chantre de l’anticolonialisme par nos confrères, voici les derniers mots de la tribune citée ci-dessus : “Alors peut-on être souverainiste, panafricaniste, sans être raciste ? Oui. Peut-on mener le combat pour le souverainisme et le panafricanisme sans se lier à des suprémacistes ? Oui. Continuera-t-on à dénoncer, en toute sérénité, ces racistes et suprémacistes dont il est question ? Oui.” On se reconnaît pas mal là-dedans, au Tangue : on peut être anti-colonialiste sans pour autant aller applaudir Kémi Séba, dont il eût été utile de rappeler aux lecteurs qui il était. Après, hein, vous en faites bien ce que vous voulez…

L. C.