Il se rêvait en Dr No, il finit en Cruchot

 

Des fois, on s’imagine des vies pleines d’aventures, avec des espions qui nous en veulent, des organisations secrètes maléfiques qui tentent d’organiser des complots contre nous, parce qu’on connaîtrait des informations secret-défense qui pourraient mettre en péril l’humanité toute entière… La vie de James Bond, ça fait un peu rêver.

 

 

Et puis, souvent, la réalité nous rattrape : on est juste député d’une circonscription de campagne, dans une île perdue au fin fond de l’océan Indien, rattaché à un parti minoritaire à l’Assemblée nationale. Alors, quand le bureau de votre permanence se fait cambrioler, vous imaginez les barbouzes, le vol de données sensibles, l’intimidation. bref : le complot ourdi pour vous faire taire vous, le valeureux lanceur d’alerte seul contre les superpuissances et les méchants de la CIA.

 

 

D’accord, le député Jean-Hugues Ratenon évoque bien l’hypothèse de “marginaux” (on notera le choix du vocabulaire ; pour un député de gauche, la grosse classe), mais ce n’est pas cette éventualité qu’il développe le plus, et alors que l’enquête commençait à peine. “Matériel informatique” dérobé, en “connexion directe avec le site de l’Assemblée Nationale” (en gros, il a un raccourci sur Explorer vers l’Intranet de l’AN…), le député se pose la question d’une éventuelle “intimidation” : “C’est fait par qui et pour qui ? Essaye t-on de m’impressionner pour me faire taire dans mes combats et mon engagement pour le territoire? Est-ce que c’est ma proximité avec le peuple qui inquiète certains ?

Alors, d’une, en général, le vandalisme, c’est plutôt le fait de ses petits copains fafs.  De deux, on se demande bien quelles prises de position il a pris qui pourraient susciter des vols de données et un saccage de ses bureaux. La réintégration des soignants non-vax ? La stigmatisation des Comoriens et Sri-Lankais ? On sait pas trop. Mais Ratenon semble bien imaginer qu’on puisse lui en vouloir, et il a donc tenu à le faire savoir, on en pleurerait : “Ces actes ne m’intimident et ne m’intimideront pas.

Sauf qu’hier avait justement lieu le procès de l’auteur du cambriolage, à Champ-Fleuri. Et c’est un excellent papier du JIR qui nous en fait le compte-rendu, assez tordant, finalement : “Il n’y a pas l’ombre d’un doute sur le fait que la permanence du député Jean-Hugues Ratenon n’était pas visée en tant que telle par le prévenu. Même si celui-ci s’y est introduit à deux reprises. Il s’agit bien au contraire d’un gars paumé que les gendarmes ont fini par prendre la main dans le sac presque par hasard. Le garçon, né à Mayotte en 2002 et établi à La Réunion depuis 2019, semble ignorer jusqu’à l’existence de Jean-Hugues Ratenon.

Le boug’ le connaissait même pas, et volait “pour manger“. Terrible : vous vous imaginiez héros dans Golden Eye, vous étiez en fait figurant dans le Gendarme de Saint-Tropez.

L. C.