“Pour emmerder Téréos, on va faire pousser des oignons… Non, j’déconne.”

Le Tangue a (presque) interviewé un agriculteur spécialisé dans la culture de la canne à sucre, et qui manifeste en ce moment un peu partout dans l’Île.

 

Dites, vous en mettez, un beau bordel ! C’est les vacances, et vous réussissez à nous mettre des bouchons à Saint-Denis, bien joué !

“Et vous avez encore rien vu. Tant qu’on n’aura pas ce qu’on veut…

 

Mais en fait, d’ailleurs, vous voulez quoi ?

Cherche pas, y a que nous qui comprenons. Bon, en gros, on veut pouvoir continuer à gagner notre vie en cultivant de la canne à sucre. Faut que Téréos nous refile du blé, c’est tout. Ils en gagnent plein.

 

Ouais, pas con. Mais finalement, avec la signature de la “convention canne” tous les cinq ans, c’est toujours un peu le même bordel, non ?

Ah, c’est sûr que tous les cinq ans, on annonce la fin de la “filière canne” à La Réunion, on bloque, et c’est reparti pour un tour. Ça peut durer encore un moment !

 

Y a pas un moment où vous vous dites qu’à force, faudrait faire autre chose ?

Quoi ? La canne, la canne, la canne. Ça fait des siècles qu’on fait ça, pourquoi changer ?

 

Des siècles, oui, mais symboliquement, la culture de la canne, c’est quand même vraiment pas des bons souvenirs à La Réunion, non ?

La canne, c’est la tradition, na. La Réunion, c’est la canne. Je comprends pas pourquoi on ferait autre chose.

 

Ben je sais pas, moi, pour l’écologie, la gestion de l’eau, l’alimentation de la population, le diabète…

Ok, ok. Pour emmerder Téréos, on va faire pousser des oignons… Non, j’déconne. Nous, on veut faire de la canne. Quand je vois un petit obèse qui boit du Cot, je lui fais un bisou, pour le remercier de soutenir la filière.

 

C’est pas un peu anachronique, votre combat pour la canne, alors que l’autosuffisance alimentaire est devenue un sujet politique ?

L’autosuffi quoi ?

 

Vous avez pensé à manifester, par exemple, pour obtenir des aides à la reconversion vers d’autres cultures ?

Ben, avec notre compte CPF, on a plutôt fait des formations pour apprendre à cuisiner la canne. On sait faire des cari cannes, des vindaye de cannes, des samoussas cannes. Cannes bringelles, cannes farcies, pâté de cannes… Nous, on s’en fout, hein, tant qu’on fait de la canne…

 

Non, mais vous pourriez par exemple bloquer les routes pour réclamer auprès de l’Etat des aides pour passer à la culture de carottes, ou même de maïs pour nourrir les poules…

Maintenant qu’on sait faire le cannes ti Jacques, ce serait con !

 

Mais alors, ça va être rebelote dans cinq ans, votre histoire ?

T’inquiète : nos terrains agricoles, ils se font régulièrement déclasser. Quand on vend un terrain pour construire des immeubles, je peux te dire qu’à ce moment-là, on s’en fout un peu, de la canne. On sera de moins en moins. Mais ceux qui restent, ils seront de nouveau sur les rond points en 2027, t’inquiète.

 

Avec la fin des moteurs thermiques, l’épuisement des ressources en énergies fossiles, y aura toujours les transporteurs avec vous, de toutes façons…

Transporteurs, filière cannes : tous unis dans les combats d’arrière garde !”

Propos (presque) recueillis par Le Tangue

 


Cette interview est une parodie. Tous les propos tenus sont inventés, et toute ressemblance avec la réalité ne saurait être que fortuite.



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