Bienvenue au club, Mémona !

La Région peut mettre son drapeau en berne : 2023 aura été l’année de toutes les compromissions avec l’extrême-droite pour nombre de politiques peï, même de gauche. Va-t-elle aussi renommer le lycée Mémona Hintermann-Afféjee ?

 

Je participe au financement du Tangue 

 

 

Oh Mémona… Oh Mémona, pas ça, Mémona… Pas ça, oh non, pas ça, pas aujourd’hui, pas maintenant, pas après tout ce que tu as fait… C’est donc avec incrédulité – et soyons franc, une immense déception, mais on n’est plus à ça près – que Le Tangue a lu, la semaine dernière, cet édito de notre ancienne consoeur, Mémona Hintermann-Afféjee, dans la Dépêche du midi. Titre ? “Immigration : le modèle réunionnais craque“. Précision, dès le début : “Quiconque souhaite réellement saisir les enjeux de l’immigration sur un mode de vie devrait observer ce qu’il se passe ici, à l’île de La Réunion. Ce volcan – français – depuis 1642, bien avant Nice ou La Savoie, est en proie à des changements violents. La cause ? Des afflux massifs de population illégale en provenance des îles voisines des Comores via Mayotte.” “Afflux massif” ? Ben tiens : en 2018, 0,5% de la population vivant à La Réunion est née aux Comores (lire ces chiffres de l’Insee). Dès le début, elle raconte donc n’importe quoi : parmi la population née à l’étranger qui vit à La Réunion, celle des Comores est la moins nombreuse.

N’empêche : pour une des Réunionnaises les plus connues et admirées dans le pays, c’est bien cette poignée de Comoriens qui mettraient en danger notre fameux vivrensemble. Argumentaire xénophobe à l’appui, à la Thierry Roland, du genre : “ils se ressemblent tous” : “À part les Comoriens eux-mêmes, peu d’étrangers peuvent faire la différence entre une personne originaire de Mayotte, de Mohéli, d’Anjouan, de la Grande Comore.” En voilà, de l’argument. Et puisqu’un Thaïlandais, il y a quelques années, a pris l’auteur de ces lignes pour un Allemand, fusionnons donc Paris et Berlin, tiens… Catastrophique.

Car le problème, pour Mémona Hintermann-Affejee, c’est que les Comoriens – et les Mahorais, du coup, apparemment, c’est les mêmes : “Le brassage des années a permis aux Réunionnais de définir un code de vie basé sur des valeurs communes, pratiquées à l’occidentale. Ce qui n’est pas le cas de la vaste majorité des Mahorais ou de leurs cousins.” Pas assez occidentaux, les cousins de l’archipel. C’est un peu de leur faute, si les autres réunionnais sont racistes : les Noirs du canal du Mozambique, z’ont qu’à manger du rougail saucisse (pas très occidental, au demeurant…). Notre illustre consoeur reprend donc tout le gloubiboulga de l’extrême-droite à base de supériorité de la culture occidentale, d’afflux imaginaire d’immigrés et de victimisation des populations natives qui subiraient une violence forcément dûe à l’immigration. Chapeau, on l’a pas vue venir, celle-là !

Ce qui tombe bien, c’est que la Région, en charge des lycées, vient d’avoir une poussée d’antifascisme. Et que sur les hauteurs de Saint-Denis, y a un lycée qui s’appelle “Mémona Hintermann-Affejee”. On a donc hâte de voir la suite. C’est un peu ça, le problème de donner des noms de personnes encore vivantes à des bâtiments. Manquerait plus que Daniel Narcisse fasse des saluts nazis.

 

La gauche invitée par l’extrême-droite

 

Car ce matin, la Pyramide inversée aurait mis son drapeau en berne, “Suite à l’adoption de la loi immigration par le Parlement“. Tiens ? Ca se réveille, là-haut ? Il était temps.

2023 se termine, et l’épisode Mémona n’est en fait que le dernier d’une série qui nous a occupés toute l’année (et les précédentes), au Tangue. Une année où le personnel politique de premier plan faisait tout l’inverse que cette posture antifa que vient de prendre la Région.

Même dans ses rangs, d’ailleurs. Ne nous éternisons pas sur les multiples accointances de Jean-Hugues Ratenon, tant pour se faire élire que carrément dans les idées : c’était en 2022. Pas besoin de remonter si haut : depuis quelques semaines, Le Tangue documente la nouvelle offensive des antivax, dont les liens avec l’extrême-droite ont été démontrés, qui font de l’entrisme dans les mairies. Et parmi les maires qui ont applaudi, parfaitement au courant du pedigree de leurs invités, qui retrouve-ton ? Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis, et Jacques Técher, maire de Cilaos, tous deux vice-présidents de la Région. Et hop, un petit coup de canif dans le contrat.

 

Les antivax font bien de l’entrisme dans les mairies

 

Pas de réaction, encore, lorsque les alliés (au moins pour les élections) du PCR inventent une “explosion de violence” qui n’existe pas dans l’Est. Reprenant les plus beaux arguments de l’extrême-droite, dans un silence de mort.

 

Quand le PCR utilise les mêmes ficelles que l’extrême-droite

 

Pas de drapeau en berne, non plus, ni d’exclusion, lorsque Ruth Dijoux, porte-parole de Génération Écologie La Réunion et ancienne colistière de Huguette Bello s’est faite inviter à Bruxelles par la députée Maxette Pirbakas au parcours entre RN et Reconquête !. 

 

L’extrême-droite envoie les invit’ à Bruxelles, des Réunionnais accourent

 

Cette même gauche qui, avec le camp d’en face, n’a d’ailleurs pas vraiment été très vaillante dans la lutte en faveur des minorités lorsqu’il s’est agi de saluer le départ à la retraite de notre évêque favori.

 

Pédophilie, homophobie… Mais Aubry, il écrit des poèmes !

 

Car si quelques membres de la gauche locale ont clairement noué des liens avec les fachos, il faut dire aussi qu’ils ont fait, en 2023, tout un tas de petites compromissions, laissant le champ libre aux idées réactionnaires. En roupillant, par exemple, lorsque des croix gammées sont apparues sur les murs de La Réunion.

 

Mort aux Juifs ? Tant qu’ils portent un slip…

 

Ou encore en ne trouvant rien à redire à la parole xénophobe et sexiste d’un livre édité par la marque réunionnaise la plus connue en cette fin d’année.

 

Le guide Pardon!, complètement réac

 

On dira ce qu’on voudra, mais au moins, chez les cousins de Mayotte, on est plus droit dans ses bottes, on ne se déclare pas antifasciste selon le sens du vent. La députée Estelle Youssouffa, par exemple, ne demandera pas à mettre en berne le moindre drapeau : elle a voté pour la loi immigration, inspirée par l’extrême-droite, avec gourmandise. Ca n’étonnera pas, pour le coup, les lecteurs du Tangue. 

 

Le discours très facho-compatible de Estelle Youssouffa

 

Dans la lutte antifasciste, Le Tangue s’est retrouvé bien seul, cette année. Même les confrères ont carrément fait le jeu du RN et des partisans du Z.

 

2023, année de la CNewsation de La Réunion

 

Revoilà Maxette, toujours à l’extrême-droite, sauf pour la 1ère

 

La mise en berne des drapeaux – jusqu’à Trois Bassins, dont le maire avait pourtant soutenu Nicolas Dupont-Aignan en 2022 – marque-t-il une prise de conscience à trois ans d’une présidentielle promise au RN ? Faut pas déconner non plus : taper sur les Comoriens, les Mahorais, les Sri-Lankais, ça rapporte encore beaucoup trop dans les urnes. 

La rédaction du Tangue

 

 

 


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